CLE DE VIE

CLE DE VIE (27-01-2021)

Lien vers la pratique

Cet enchaînement est un mouvement d’ascension, d’aspiration, d’élan dans l’amour et c’est un mouvement de redescente.
Pratiquement tous les enchaînements mudras s’articulent ainsi. Celui-là invite à créer un cosmos, un espace où vivre.
Ici, pour les égyptiens, entre la rive Est  où étaient toutes les habitations et les cultures ; et la rive Ouest, où étaient les tombes et le culte des morts ; aussi entre le Nord et le Sud là où coulait le Nil qui était pour eux vraiment l’axe de vie, entre Terre et Ciel. Cela rejoint l’enseignement sur Shou – Nout – Geb.
Le cosmos est un dharma (ce qui est juste et à sa place), un mandala.

Nous vivons ce mudra qui dessine comme une croix ansée. (On l’appelle aussi la croix de vie, et également le nœud d’Isis, Ankh).
Cette boucle, au départ était comme un nœud. Elle représente l’émergence de la terre qui sort du Nil. Après la crue, il y avait la première butte qui en sortait. La  terre où les êtres humains pouvaient vivre. Ce lieu béni à partager s’agrandissait et le limon se révélait très fertile. Ils étaient obligés de s’organiser,   ils devaient travailler ensemble. S’ils ne s’accordaient pas au niveau des terres émergées, ils allaient mourir de faim puisqu’ils étaient entourés de désert.
Donc c’était un nœud pour relier. Une boucle et les axes perpendiculaires, un cosmos : en fait c’est la première croix des chrétiens coptes.

Ce socle ferme est important, les racines nous permettent de nous redresser. Nous nous enlisons quand nous portons tout le poids de notre esprit, de notre rabâchage intérieur sur un point. Nous nous enfonçons, impuissants, le mental s’affole, lui qui est un bon serviteur, devient un mauvais maître…
Par l’orientation du cœur et l’appel, mais aussi la détermination dans l’exercice, on peut trouver des appuis pour sortir du marécage. Ainsi dans une pratique physique il ne faut jamais se placer sur un support trop mou. Si nous nous enfonçons il faut vraiment élargir notre cœur, notre attention, certains disent faire le pas de côté…et à ce moment-là Krishna ou toute autre manifestation peut réveiller en nous le dialogue intérieur avec le Soi, notre part divine, essentielle. Parfois ce peut aussi être une rencontre qui semble banale (les dieux et les fées se cachent souvent sous des apparences  malicieuses). Nous pouvons retrouver le Centre, le sens, ouvrir les bras en accueil comme dans la croix aimée de St François d’assise.

La boucle représente aussi un visage. La vision du visage, des yeux de l’autre, son sourire et tout ce qui émane de lui éveille en nous la rencontre, la vie. On ne peut pas vivre sans relation affective incarnée, et en ce moment de confinement, on en ressent parfois crucialement l’absence.
Ce face à face avec l’autre qui n’est pas comme nous, l’autre, le différent. Le philosophe Levinas en a beaucoup parlé. Un visage est une icône : dans la terminologie grecque le mot icône, utilisé pour les représentations de Jésus et des saints, c’est une fenêtre sur l’infini. C’est le contraire d’une idole. Jean Yves LELOUP développe cela très bien. L’idole nous arrête, l’icône nous fait passer au-delà. Dans le mudra de l’icône, du câlin à distance, on peut se tourner vers une forme qui représente l’amour au-delà de tout nom, de toute forme.
Mais aussi accepter d’être cette forme, unique, précieuse que nous devons respecter et chérir comme le temple de l’essentiel au-delà de tout. Cela nous dépasse.

  Ensuite, dans l’étirement des bras nous appelons à l’amour et nous acceptons qu’il nous écartèle, nous dilate au-delà de notre petit moi.
Appel…Pas seulement à l’amour absolu et infini, mais l’amour de êtres tels qu’ils sont, comme ils sont avec leurs petits défauts, qui nous les rendent si chers, qui font qu’ils sont uniques.
L’incarnation est le lieu où se révèle l’Amour, je le répète car nous avons tendance à refuser les imperfections, celles des autres et surtout les nôtres et fuir dans une projection : après (l’éveil, la mort, la fuite hors de l’exil) nous serons « prêts ». Mais non, c’est toujours déjà là ou jamais !

 Je résume. Quand nous faisons ce mudra, nous acceptons l’endroit où nous sommes enracinés, comme une prise de terre (au niveau énergétique) et nous créons un pont entre les différents plans (physique, psychique, le plan de l’âme, spirituel, divin). Nous ouvrons nos ailes comme Isis, nous recevons la Grâce comme les apôtres qui vont parler « en langues », nous tenons la flamme allumée comme une petite bougie debout, nous célébrons le visage de l’Amour et l’étirement de notre don, nous semons, nous essaimons, nous aimons être sur terre une semence. Animés d’un Souffle : spiritus.

Cette clé de vie je l’ai reçue entre l’Ascension et la Pentecôte. C’est très important pour moi car je suis allée dire au revoir à mon cher maître Gabriel Monod Herzen à l’Ascension 1982 ; il a quitté son corps, et je suis retournée à la Pentecôte, hériter  sa bibliothèque d’alchimie. Dans cette période je me suis sentie très guidée.

On traduit parfois mudra par sceau. C’est un geste, ou une suite de gestes, qui nous permet d’affirmer concrètement notre engagement comme une danse, une marche, une démarche vers ce qui nous est cher et essentiel, ce que j’appelle un pèlerinage. Nous dessinons et relions  différents plans pour tracer en nous l’empreinte vivante d’une Voie libératrice, une joie  qui oriente notre vie.