KHASATILA, le coquelicot.

« Quatre pétales rouges feu, noués à une mince tige par une mouche de velours noir… » 
Anne Guglielmetti Deux femmes et un jardin.

Et Colette Poggi ASANA page 268:
«  Émergeant de la terre, le jeune coquelicot arbore un bourgeon qui pend, tel un cœur, vers le sol. Plus tard il se déplie, tout fripé, puis dans une poussée d’énergie partant des profondeurs, il se redresse, aimanté par la lumière céleste »

1) Inviter le bourgeon Debout dans l’axe, bien étaler les orteils et les plantes de pied en conscience des réseaux veineux et de l’adhésion à la terre. Être  ancré sur un socle de fines racines horizontales en résille, comme le coquelicot étale sa base pour mieux se redresser. pour s’adapter , être en relation avec ce qui est, notre histoire et notre présent, notre humus. (humilité).
Ouvrir les paumes tournées vers le sol, doigts écartés. En appui sur cette base horizontale, juste sous la surface de la terre, respirer, jouer avec les genoux, le bassin et les épaules pour inscrire cette sensation d’être relié à tout le vivant, comme des racines en filaments maillés ensemble .
Ployer la tête sans enrouler les épaules  et descendre le long de l’axe jusqu’au centre de la terre.  Rester la tête inclinée, ressentir l’étirement jusqu’en bas de la colonne vertébrale, maintenir la sangle abdominale ferme et l’ouverture de la poitrine. Détente en lâcher prise. Posture de la prière du cœur dans l’Hésychasme. Le regard intérieur se fixe sur le cœur ou le nombril.dans une préparation intime de la floraison.Appeler en confiance l’élan de la sève dans la si frêle tige qui se dressera.

2) S’orienter prépare la floraison  Respirer en remontant l’axe et laisser progressivement se redresser la tête comme le bouton du coquelicot s’aligne sur les étoiles et la polarité cosmique. Accueillir une légèreté dans la tête , un sourire d’être érigé par la gravité, vers le Guru intérieur.
Lever les bras en pliant les coudes pour encadrer la tête à distance comme un mystère où s’élabore la couleur des pétales. Un espace , KHA, «à l’abri» (Khasa), intime, fragile et mystérieux.
Le pied droit s’avance un peu, établissant un léger déséquilibre dynamique dans la posture comme le coquelicot bercé délicatement par le vent.

3) Déploiement en joie. Appeler des fissures qui révèlent le rouge des pétales et déployer les deux bras vers le ciel, pivotant le buste en extension vers le haut et la droite. Déplier et défroisser les pétales, les poumons, la conscience, la jubilation de s ‘épanouir pleinement en spirale amoureuse. Les poignets sont renversés et les doigts bien écartés en corolles. Célébration intense de la vie. Rester, sourire. Extase lumineuse et simple.

4) Maturation des graines et transmission. Le vent frémit, tourne l’instant et les cycles.  Les pétales déployés s’envolent, les poignets viennent  délicatement se croiser devant la poitrine et le pied gauche rejoint le droit :posture simple de dépouillement en gratitude.

KHASATILA: cœur du coquelicot lorsque les pétales sont tombés. Les mains forment ensuite un calice devant la poitrine. Cette cassette de graines en cours de mûrissement est finement côtelée et close par un mandala rayonnant ; couronne qui se soulèvera pour semer le trésor qui s’élabore en secret : la transmission au delà de soi . Rester , sourire. Ouvrir le calice et faire le mudra «  diffusion des graines » (pouces sur les autres doigts et lâcher, semer).

KHA espace central, SA « en forme de » calice, TILA graine. Promesse de transmission 

 Cette pratique a plusieurs éclairages, elle peut aussi se vivre au cœur de l’hiver ou de la nuit : les graines semées peuvent éclore des années après. Nous ne savons pas les prolongements de nos actes et c’est le détachement des fruits de l’action dont parle La Bhagavad-Gîtâ, le karma yoga . Mais c’est à nous de nous orienter, de patienter, de déployer la joie et d’accepter la perte apparente d’une expérience fulgurante, initiatrice, pour mûrir la compassion vers tous les êtres et l’univers. Au service et en création…Oser l’épanouissement , l’émerveillement et ne pas s’attacher, lâcher l’instant fulgurant pour mûrir dans une vie donnée, offerte, une trace engagée et humble de  Ce qui nous oriente à jamais…et colore chaque instant de notre vie.